BonheurAmenuise

« Moi, en écoutant leur récit, j’avais l’impression de revenir aux sources, de faire un véritable pèlerinage. Ils me fournissent des éclaircissements sur l’âme humaine et moi aussi, je pense leur transmettre des informations en ce sens ; tu vois, c’est ça qui me plaît, j’ai l’impression de transmettre quelque chose. »
Ainsi s’exprime une des femmes, dans ce récit quotidien et chaleureux d’une renaissance qui s’effectue ailleurs. Cet au-delà des mers s’incarne dans l’île de Chiloé, cœur d’un archipel situé au sud du Chili. L’auteur y confronte, sous un ciel de pluies et dans une ambiance de bout du monde, des personnages un peu perdus que des rencontres aléatoires remettent peu à peu en selle. Le narrateur y réapprend les vertus de l’échange en regardant vivre les Araucans. Leur temps et leur espace s’imposent en toute discrétion comme d’évidentes pistes de vie.
« J’observais une gamine à laquelle je ne donnais pas plus d’une douzaine d’années. Elle tenait par la main un homme qui paraissait si usé que j’hésitai à lui attribuer le rôle du père ou du grand-père. Mais c’est elle qui l’emmenait et le guidait parmi les salles du musée. Le vieillard, aux traits indiens, s’arrêtait là où elle décidait de s’immobiliser, puis il l’écoutait lire le panonceau qui contextualisait la vitrine devant laquelle ils se trouvaient. Elle déchiffrait le texte avec peine et devait parcourir le document avec ses doigts pour s’acquitter de sa tâche. Elle lui racontait ainsi des pans d’une civilisation qu’il connaissait par la mémoire de ses aïeux. Il hochait souvent la tête pour approuver ou faisait une mimique indiquant sa surprise devant l’information que la petite dévoilait. »
Cette scène ordinaire contient bonne part du sel de cette histoire : le narrateur, attentif à ce presque rien, découvre ici une solidarité qui permet de donner de la solidité au présent et qui tisse des liens, tellement nécessaires aujourd’hui, comme hier et demain.