"Les Fosses d'Enfer", Saint Rémy-Sur-Orne 2018
Darius
Avec Jean-Yves et
Antoine, nous avons voulu cette exposition comme un contrepoint à
l’exposition d’avril 2017 au Sépulcre à Caen.
Les fosses d’enfer de Saint-Rémy-sur-Orne, ancien Musée de la mine, ont
été reconfigurées en centre culturel. La partie salle d’exposition au
rez-de-chaussée, se compose d’une grande pièce peu éclairée par la
lumière naturelle.
Autant nous avions joué avec cette lumière qui se diffusait au travers
des larges vitraux de la façade ouest du Sépulcre, autant ici nous
avons choisi de mettre en valeur le côté noir de l’encre. L’espace se
compose d’une entrée et d’une grande salle rectangulaire de vingt
mètres de long. Nous avons travaillé sur les lignes pour renforcer les
perspectives architecturales du bâtiment, tout en cherchant à les
briser dès que possible pour mieux les souligner.
Une ligne d’une trentaine de petits cadres accueille le visiteur et
donne le ton de l’exposition. On passe le sas d’entrée au travers de
grandes encres translucides, réalisées sur toile de verre intissée,
permettant de dévoiler progressivement les premières installations de
la grande salle.
Une encre de vingt-quatre mètres de long, réalisée en quatre tronçons
de six mètres, est présentée pour la première fois ; seulement 17
mètres sont visibles, suspendus à quelques centimètres du sol, dans le
début de la pièce, s’élevant ensuite vers le fond de la salle, pour
marquer le point de fuite. Dans la deuxième partie de la salle
principale, la « forêt », installation trait d’union avec l’exposition
du Sépulcre, est cette fois plus dense et plus obscure, un rai de
lumière y étant enfermé en son sein. En lisière de « forêt » une
vidéo est projetée sur le mur du fond qui emmène le spectateur au
cœur de mon travail de peintre-encrier. On y voit l’encre et la lumière
jouer à cache-cache dans un ballet à deux : est-ce l’encre qui précède
la lumière ou l’inverse ?
La cage d’escalier, qui permet d’accéder à l’espace médiathèque du
bâtiment, a également été investie avec une nouvelle série d’encres
très graphiques et très gestuelles. La grande verrière est
partiellement voilée par des encres réalisées sur mesure sur de la
toile de verre intissée. La lumière naturelle est filtrée et souligne
l’implantation du bâtiment dans le parc arboré d’essences exotiques.
Les bâches placées en extérieur ont été réalisées à partir de motifs extraits des encres verticales de la grande salle.
Étalée au
doigt, à la plume, au pinceau, à la raclette, au balai, en vagues, en
tourbillons, l’encre se déploie, se déplie de mille façons.
La lumière
L’encre fait la part belle au papier laissé en réserve.
Un espace de pure lumière qu’on pourrait croire vide et silencieux sans
ces formes sombres qui se déploient dessus. Et lui donnent vie.
La matière-encre en pénétrant au coeur du support, en s’insinuant dans
la profondeur du matériau rend visible le support-papier dans sa
matérialité, sa texture, sa chair, sa blancheur.
L’encre – noire - révèle la lumière. Elle montre autant ce qu’elle est
(une figure) - que ce qu’elle n’est pas (le fond sur lequel vient
la figure).
L’ombre
La lumière a besoin de l’ombre.
De l’ombre qui façonne les formes, les inscrit avec précision dans
l’espace, les laisse flotter sans attaches ou les fait disparaître.
Pourtant même quand le noir recouvre tout, il existe toujours une
lumière ténue, qui émerge des profondeurs du support-papier et se fraie
un chemin vers la surface.
L’encre permet de voir au loin et de très près.
Le mouvement des ombres créé par le geste détériore, transforme
l’inscription. Elle n’est plus seulement elle-même - une forme exacte,
définie, nette. Mais porte des éléments de dépassement :
arrières-plans, résurgences, évanescences, béances, superpositions,
apparitions, disparitions…
Grâce à eux, la lumière fait surgir ce qui se cache derrière. Dans la
profondeur des noirs et les traces des gestes, l’espace fini de
l’oeuvre dévoile le début d’un au-delà du visible.
Ombre et lumière dialoguent constamment. Dans l’encre, la matière n’est pas une fin en soi, juste un moyen de les faire naître.
Jean-Yves Lepetit
Bien que n’étant pas présent
pendant les périodes d’ouverture de l’exposition, j’ai pu discuter avec
des visiteurs lors du vernissage, lors des visites des élèves de
maternelle de l’école de Saint-Rémy-sur-Orne, pendant les trois gardes
que j’ai fait et lors de nombreux rendez-vous ponctuels. Plus de mille
deux cents visiteurs ont pu voir l’exposition.
Nicolas Meterreau, l’architecte qui a restructuré les locaux, n’avait
pas vu l’exposition avant le vernissage. Il était passé en coup de vent
lors de l’installation et préférait garder la surprise. Lors du
vernissage il m’a dit toute sa satisfaction et son grand étonnement de
voir son bâtiment vivre avec la lumière, la mise en espace, les
volumes... autant de caractéristiques qui traduisent la réussite de son
projet architectural. Il m’a franchement remercié pour l’exposition qui
a su mettre en valeur les traits principaux de son projet.
Beaucoup de personnes m’ont témoigné de l’effet positif et inattendu de
l’exposition sur eux. Les enfants étaient ravis de se promener dans
l’expo, avec une mention spéciale pour « La forêt ».
Pour ceux qui avaient vu l’exposition du Sépulcre, un sentiment de
nouveauté dans une continuité évidente revient souvent. L’espace, bien
que plus resserré, offre un grand volume avec un plafond relativement
bas et des murs tout blanc. Nous avons déstructuré cet espace, tout en
créant des lieux cachés dans une grande proximité avec les encres,
rendant la déambulation plus intime. Cet effet est renforcé par une
grande homogénéité des travaux exposés, l’ensemble ayant été fait entre
janvier et avril 2018 avec le même outil.
Au départ nous voulions inverser la vidéo afin de donner l’illusion de
peindre la lumière. Finalement cette idée a été abandonnée, le
dispositif approchant cet effet sans aucun trucage.
Depuis la dernière exposition j’éprouvais l’envie de retravailler le
geste guidé par la morphologie en mouvement de mon corps. Tout mon
travail depuis début 2018 explore cette voie. Lorsque je me suis
retrouvé dans l’exposition avec les enfants de maternelle, je leur
disais qu’ils devaient s’imaginer faisant dans les airs de grands
moulinets avec leurs bras tout en se déplaçant dans l’espace. Dans mon
travail, l’encre fixe ces trajectoires sur du papier...
D.
Format 15,5x23,5 cm, 136 pages. Tirage couleur en 100 exemplaires sur papier munken lynx 120g.
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à l'ordre de "Galerie 175 - Éditions du Chameau", au 15 rue Mélingue 14000 Caen.
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