"Hors-champ"
Roger Cozien
Roger
Cozien est né sur l'île de la Réunion. Ses études l'ont mené jusqu'à
une thèse de doctorat en informatique et sciences physiques.
Parallélement, il s'est initié très tôt à la photographie déburant sur son île natale dès les années de collège.
Son parcours photographique a croisé
son parcours professionnel puisqu'il développe à la fois des techniques
avancées et scientifiques de photographie mais également des logiciels
scientifiques de traitement des images numériques.
Ces travaux scientifiques lui
permettent de collaborer depuis plusieurs années avec l'Agence
France-Presse, le ministère des Armées, le ministère de l'Intérieur, la
Commission Européenne. Il est également expert en photographie
auprès de la Cour d'appel de Paris.
Sur le plan artistique et
photographique, il puise son inspiration dans le cinéma et les séries
modernes. Passionné par la technique et le matériel, il ne fait pas de
distinction entre plaisir d'utiliser un type de matériel donné et le
plaisir de photographier. Pour cette raison, il est très attaché à
l'utilisation du Leica M et de ses optiques les plus récentes et
performantes. Celles qui justement, permettent d'obtenir des images
semblant sortir tout droit d'un film. Il cherche en permanence de
nouvelles façons de photographier ainsi que les situations et
conditions les plus « cinématographiques ».
Préface de Serge Mauger
La magie du monde appartient à ceux qui lèvent les yeux… et qui regardent. Moins à ceux qui se contentent de voir.
Roger Cozien fait partie de ceux qui regardent !
Equipé de ses Leica il délimite les
contours du monde en arpentant les chemins de la vie, choisit des
instants singuliers et arrache des images au trop plein de nos
accumulations visuelles. « L'oeil n'a jamais fini de découvrir » dit
l'Ecclésiaste. Mais on se souvient aussi que pour Jankélévitch, le
philosophe du « presque rien », les choses essentielles à notre
intériorité spirituelle et esthétique sont invisibles si on ne va pas
les chercher à l'entour de nos routines. Ce qui revient à dire que
l'imaginaire et l'ailleurs sont à portée de chacun pour peu que l'on
adopte l'étonnement comme discipline.
Regarder, pour Roger Cozien, c'est
déjouer les banalités du quotidien, dé-trivialiser des pans entiers de
réalité en y projetant la fulgurante mathématique d'un champ visuel
renouvelé. Regarder c'est placer le monde dans un polygone à angles
droits et rejeter « hors champ » ce qui, momentanément, ne fait pas
partie du concert intérieur. Le rectangle de la camera oscura pondère
deux espaces, délimite une frontière et une porte d'accès entre le
vague du laissé pour compte et la densité d'un lieu restitué à sa
singularité. Oratoire marqué de paganisme et d'animisme le cadre est
comme le temple tracé dans le ciel par Romulus et Remus pour lire leur
destin. Tout ce qui s'y trouve devient signifiant, dense, essentiel. Ce
moment de lumière captive marque le tempo de notre perception des
choses, provoque l'éblouissement géométrique de l'instant contre le
déroulement insensé, trépident et fade des saturations. On sertit le
monde en deux dimensions pour le mettre en harmonie avec les lignes de
force. Le « hors-champ » s'efface provisoirement et le « champ »,
chargé d'une densité stratifiée, embarque à son tour l'extérieur dans
un récit créé par le théâtre de nos mémoires où l'imaginaire s'active.
Roger Cozien est l'un de ces
aventuriers du réel, reporter de l'éphémère, qui, dans la parallèle de
ses tâches professionnelles, envoie volontiers par dessus les toits
tout son bagage d'entrepreneur surdiplômé et ses qualités d'experts
pour redéfinir en images sa présence à hauteur d'homme en cherchant
dans la vie les arpèges d'une symphonie graphique.
Contrairement à un Martin Parr, qui
propose des sortes de chroniques sociales acérées proches du grotesque,
où l'on hésite entre la fascination et la répulsion, entre l'humour et
la commisération pathétique, Roger Cozien, dans ces cahiers « Hors
Champ » n'opte pas pour une anthropologie du sordide ni pour creuser
l'effroi splendide de la désolation. Pas plus qu'il n'explore les
registres plus troublants d'une Diane Arbus, qui, avec ses arriérés
mentaux et ses junkies, violente l'esthétique du bon goût, se veut
lucide, cruelle et bienveillante.
Arrêtant ses pas au détour d'une rue
de Rabat ou de Montréal, empruntant les couloirs du métro de Paris ou
ceux des aéroports internationaux, Roger s'appuie au chambranle d'une
porte, s'accoude aux choses immédiates des trottoirs, capte des éclats
de lumière et se consacre à des plénitudes suspendues aux instants du
hasard. Sa mission est de prendre acte de l'imprévu. à l'écart des
prétentions conceptuelles qui sont parfois la gangrène d'une modernité
infatuée, il explore l'espace en 24X36 pour témoigner d'une harmonie
que les rafales du déclenchement pourront révéler sur un pari qui
sollicite la chance. Il déclenche en apnée, cherchant l'essentiel d'une
scène de genre entr'aperçue et par quoi le monde dit ce qu'il a à dire.
C'est dans l'activité de langage que s'organise l'humain et se
structure l'esprit. Son langage est intuitif et opère au-delà des mots.
Mais ses photographies parlent, s'écoutent, se lisent en mode majeur.
Le déclic au 1/8000 de seconde montre des choses qui se tiennent à
l'écart, singulières, pleines d'évidences poétiques qui nous intègrent
tous.
L'univers photographique de Roger
Cozien est un silence qui suggère, un langage visuel propre à aborder
les analogies. Une ancienne rhumerie des Caraïbes, qui pourrait être
une désolation, se métamorphose en cathédrale de lianes parmi de
vieilles structures métalliques aux résonnances de Tour Eiffel. Les
racines de banians s'articulent aux vitraux de feuilles dans un instant
de complicité où la lumière transcende les ruines. Et, par des
similitudes de composition qui sont comme des sortes de rimes, on se
retrouve à Paris, aux abords d'une brasserie dont le rapprochement,
sans jamais rien épuiser des expériences, suggère une elliptique
réalité de correspondances abstraites.
L'appareil photographique, même en
grand angle et réglé sur l'infini, est toujours le microscope qui
focalise l'esprit en lui suggérant tout un arrière ban de Hors champ.
Un outil optique pour dévoiler la beauté fugace et étrange, disparue
dans l'instant même où se dessine l'étonnante synchronie d'une fillette
et de son chien, qui dansent d'un même pas sur le trottoir. Cette chose
qui n'est arrivée qu'une seule fois et jamais plus n'arrivera, notée
dans une fixité qui en déploie le mouvement. Le regard d'une autre
petite fille, venue d'ailleurs, est mis en page pour créer une
imaginaire complicité. Ailleurs encore, le monde est une polyphonie de
ballons métalliques, gonflés à l'hélium, qui ont intégré la mémoire des
carlingues d'un musée d'aéronefs. Ou bien c'est une haute note jaune
captée un instant sur la robe d'une femme dans l'après-midi d'un quai
souterrain.
Roger Cozien s'intéresse aux
mystères a priori impalpables, fait de la chose qui arrive une ivresse
éphémère, découvre les tournures insolites de ce qui devait n'être que
la vie dans sa futilité. Une vanne rongée d'oxydations vertes et jaunes
est relue en sculpture qui contient le récit d'une histoire pas si
lointaine, peut-être la mémoire d'une domination sous servitude.
D'autres images renvoient à des
dialogues imprévus et à distance, inexistants mais restitués par la
rupture de l'espace temps et un autre arpentage des clôtures
chronologiques. Il y aurait là comme une rencontre quantique. Il ne
s'agit que d'ouvrir les yeux dans tous les endroits du monde, le métro
ou le pont de Brooklyn, la terrasse d'un bar d'avant le confinement ou
les flamboyants secrets de la nuit underground …
Photographier pour Roger Cozien
c'est provoquer l'avènement de ce qui est là, en soustrayant tout ce
qui surcharge la rétine et embrume l'esprit. C'est se désencombrer du
cumul et du tumulte qui nous contraignent à l'indifférence et
neutralisent notre capacité à la « différance »- si l'on veut parler
comme Jacques Derrida. Ce qui demande un œil critique et un
discernement fort éloigné des acrobaties bluffantes de l'art sans art.
Dans cette concertation graphique, c'est l'instinct qui déclenche
l'épiphanie du réel et nous oblige à tenir compte de l'insolite, à
chambouler nos résignations systémiques et naïves d'automates du
métro-boulot
Photographier c'est voir deux fois,
peut-être trois, peut-être plus. Les attracteurs magnétiques et les
lentilles asphériques de Roger Cozien l'emmènent dans tous les recoins
de la planète. Il rafale à tout vent comme pour enquêter sur l'ultime
décimale de l'inépuisable nombre Pi ou les frontières indécises des
nombres premiers. Ce qui ne l'empêche pas d'admettre qu'il n'y a dans
cette aventure de l'esprit rien qui prétendrait à une clôture
résolutoire ni aucun discours définitif sur le monde ou sur l'image.
Rien, si ce n'est des éblouissements provisoires et renouvelables.
Manière de rencontrer le plaisir d'être là, « mêlé des mains à la facilité du jour », aurait dit Saint John Perse.
Préface de Cyril Thomas - Directeur Général de Leica France & Bénélux
J'ai
tout de suite été enthousiaste quand Roger m'a appris la parution
prochaine de son premier livre photo. Je connais Roger depuis quelques
années. Roger rentre dans cette catégorie des photographes avertis ;
des gens dont le métier principal n'est pas la photographie, mais qui
néanmoins n'ont rien à envier à des photographes professionnels. Nous
avons là un grand voyageur passant d'un aéroport au suivant, habitué
des décalages horaires et grand amateur de l'Amérique du Nord d'où il
revient souvent avec des images contant de belles histoires.
Roger est depuis longtemps un
passionné de photographie, à la recherche du « beau ». Cet ingénieur
d'exception est doté d'une grande sensibilité et d'un regard singulier
sur le monde qui l'entoure. Tel tout grand photographe, il a un « œil
», c'est-à-dire cette extraordinaire aptitude à détecter une scène
insolite, un moment particulier, une émotion, qu'il sait parfaitement
immortaliser à l'aide de son Leica. J'ai toujours pensé que ces
qualités sont essentielles pour devenir un grand photographe ; Roger
est doté de toutes ces qualités qui se retrouvent dans le résultat de
son travail photographique.
Roger est aussi percutant en couleur
qu'en noir et blanc. D'un côté, il nous livre des images couleur
piquées et contrastées, souvent animées par un éclairage subtil, de
l'autre, sa sensibilité et la recherche d'une certaine sensualité sur
son travail en noir et blanc, notamment avec les portraits où il
excelle.
Son travail est fortement influencé par l'univers et le cadrage du cinéma.
Roger n'est pas un homme de
compromis. Quand il s'engage, c'est un engagement complet. Je pense que
l'on peut dire de lui qu'il est un esthète. Que ce soit pour son
travail de photographe ou dans ses goûts personnels, il est constamment
à la recherche de l'exceptionnel et du beau. J'aime regarder son
rapport à son Leica, qu'il emmène comme un compagnon de route dans tous
ses déplacements.
J'espère que ce livre est le
premier d'une longue série de livres photo qui ne pourront que refléter
la passion et la sensibilité de ce grand amoureux de la vie en
constante recherche de perfection.
Format 25 x21 cm, 104 pages. Tirage quadri sur papier Artic G-snow couché 150 g/m2. ISBN : 978-2-490962-04-4.
Prix de vente 20€ plus 6€ pour les frais de port pour un exemplaire, 8€ pour deux exemplaires. Si vous souhaitez acquérir
un exemplaire, vous pouvez télécharger un BON de COMMANDE (au format pdf) et envoyer un chèque
de 20€ plus 6€ de frais de port,
à l'ordre de "Galerie 175 - Éditions du Chameau", au 15 rue Mélingue 14000 Caen.
Quelques pages extraites du livre :

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