"Norbert Girard. Les Années Arsenal", 2015
Norbert Girard
Norbert Girard a pris le large pour
toujours le 1er janvier dernier. Il aurait préféré rester un peu plus
longtemps parmi nous si la camarde n’en avait décidé autrement. On
aurait aimé aussi.
Dans la presqu’île du Cotentin et bien au-delà, tous ceux qui
connaissaient « Nono » ont le souvenir de ses traits d’esprit. Après
avoir traversé les chantiers de l’Arsenal, il a été, simultanément ou
successivement, menuisier, marin (à ses heures) avec les Voiles
Écarlates, photographe passionné… Avec Elisabeth, il officiait à
équeurdreville, comme figure de proue et « second Captain » du Surcouf.
Militant engagé auprès des syndicats ou de Greenpeace, il était
musicien, poète de la lumière, rêveur et homme d’action…
Norbert, qui menait sans doute neuf vies à la fois, était également
écrivain. Il avait, entre autres, commencé à rédiger ses mémoires
(qu’il appelait son « Journal »). Elles resteront inachevées.
Mais les quelques cent pages qu’il nous laisse sont plus qu’un récit
anecdotique ou une reconstruction de souvenir de jeunesse. Elles sont
un témoignage et un commentaire très subtil, fait de portraits,
d’analyses et de réflexions, souvent drôles. Un dernier clin d’oeil
aussi, que ce lutin-lutteur adresse aux amis qui n’ont peut-être pas
fini de le découvrir.
Format 13,5x19 cm, 186 pages, tirage sur Munken Lynx 90 g. ISBN : 978-2-917437-56-8. Prix de vente 15 € (+ 4 € pour frais de port). Si vous souhaitez acquérir
un exemplaire, vous pouvez télécharger un BON de COMMANDE (au format pdf) et envoyer un chèque
de 15 € plus 4 € de frais de port,
à l'ordre de "Galerie 175 - Éditions du Chameau", au 154 grande-rue
14430 Dozulé.
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Extrait du journal :
... Les journées
me semblaient interminables, des maths, toujours des maths au
programme. Je continuais, le samedi en fin d’après-midi, à donner des
cours de musique, j’y prenais plaisir. J’attendais, impatient les
vacances de Noël, nous n’avons pas eu à attendre ces congés pour nous
divertir. On nous intimât l’ordre, le mot n’est pas trop fort, de nous
rendre le douze décembre, au lancement du sous-marin le Terrible. Nous
nous sommes retrouvés, les trois promotions confondues, sagement
alignés dans la cale, avec plein d’invités attendant comme nous,
l’instant magique de la rencontre de la mer et du long cigare
noir. Michel Debré, ministre des armées sous la présidence
Pompidou, faisait office de maître de cérémonie. Il voulut se lancer
dans un discours aussi ronflant que gonflant, tout à la gloire de notre
prestigieuse force de dissuasion. Une clameur vint l’interrompre, les
ouvriers mécontents faisaient entendre leur voix couvrant de la sorte
le propos ministériel. Nous étions hilares, notre hiérarchie faisait
les cents pas derrière nous, c’était la porte si un son sortait de nos
rangs. Nous n’avons pas bougé, on ne comprit rien de l’allocution du
sinistre, ainsi le qualifiaient les ouvriers. D’où nous étions, nous
n’avons pu voir si le représentant de l’état était toujours présent
quand le sous-marin a rejoint son environnement liquide. Debré voulait,
je crois, s’attaquer au statut des travailleurs de l’état, ça ne
passait pas du côté des prolos.
Les vacances de noël permirent aux futurs prolétaires de reconstituer leur force de travail.
Le deuxième trimestre, en cette année
mille-neuf-cent-soixante-dix, fut entièrement consacré aux révisions.
Ce qui me laissât un peu de temps à consacrer à la photographie. Depuis
la cinquième, première du nom, je possédais un petit appareil photo
Instamatic. La photographie me tenait à cœur, à tel point que l’année
de mon redoublement, ne doutant de rien, je m’étais inquiété de savoir
si une école, sur Paris, accueillait des élèves de mon âge. On sait ce
qu’il advint.
Le centre de formation possédait un labo
photo, Jean Mars l’animait, quelques fois, je m’étais enfermé dans
cette atmosphère de lumière rouge si particulière, qu’est le studio de
développement. L’ambiance un peu potache qui y régnait ne me convenait
pas plus que ça. Nous ne pouvions profiter seul du matériel mis à
disposition, c’est par petits groupes que nous étions initiés. Cela me
permit tout de même d’acquérir quelques bases qui me furent bien utiles...
Article paru dans le journal Ouest-France du 4 mars 2015 :

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