Texte et photographies d'Ettore LABBATE. Format 21 x 21 cm, 96 pages. Tirage numérique Noir et Blanc, en 100 exemplaires. Prix
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à l'ordre de "Galerie 175 - Editions du Chameau", au 154 grande-rue
14430 Dozulé.

la couverture
Géographie
est le premier volet d’un projet de voyage qui ne peut être entrepris
sans la crise de la langue et donc sans l’entreprise d’un nouveau
langage.
– Est-ce là,
dans ce non-lieu de la parole, le lieu de la poésie ? Cette
insuffisance de la langue, par quoi même une langue maternelle finit
par devenir étrangère, tout comme la langue étrangère la seule manière
pour la retrouver ?
– D’autres versions de ce voyage suivront celle-ci, tous les ans, en France ou en Italie.
Article de Aymen HACEN, paru dans "La Presse de Tunisie"du 7 janvier 2011.
Géographie d’Ettore Labbate :
« est étranger qui sait demeurer loin de sa terre »
Originaire
d’Ugento (Pouilles) en Italie, Ettore Labbate a étudié les Lettres
Classiques à l’Université de Padoue. Enseignant à l’Université de Caen,
il a publié La voix dans le vide. Sonnets de Giacomo Lubrano (Paris,
Cahiers de l’Hôtel de Galliffet, 2009)1. Également écrivain, il
collabore aux revues Résonances Générales,
Grumeaux, Frictions, Lo Scirocco, tout en écrivant en italien
et en français. Ainsi, Ettore Labbate vient de publier Géographie2, aux
éditions du Chameau en France, en même temps que Géographie 2 aux
éditions Manni en Italie, comme si le même projet, pour le poète, ne
pouvait pas se passer du besoin profond de prendre la langue au collet
et de la soumettre à une interrogation musclée.
« Géographie,
écrit-il au seuil du livre, est le premier volet d’un projet de voyage
qui ne peut être entrepris sans la crise de la langue et donc sans
l’entreprise d’un nouveau langage. — Est-ce là, dans ce non-lieu de la
parole, le lieu de la poésie ? Cette insuffisance de la langue,
par quoi même une langue maternelle finit par devenir étrangère, tout
comme la langue étrangère la seule manière pour la retrouver ? —
D’autres versions de ce voyage suivront celle-ci, tous les ans, en
France ou en Italie. »
Ses mots nous semblent en effet servir
de mise en garde. Certes, ils introduisent le projet initial pensé et
mis en place par le poète-photographe, mais ils témoignent d’une
violence réelle. Or, le lecteur de Géographie s’aperçoit que cette
violence a été subie par Ettore Labbate, si bien que l’acte créateur se
sent obligé de riposter :
« La mort suspend la voix le deuil en interrompt le travail tu ne
sais pas si tu parles si tu peux encore parler en quelle langue tu le
fais le feras si un jour à nouveau te mettras [à la pratiquer
Dans l’attente tu récoltes au dehors voix et images qui ne
t’appartiennent pas étrangères pas à toi tout ce qui peut bien
arriver t’arriver et parait un instant supportable — pouvoir être dit
par toi plutôt [à travers » (p. 25)
L’écriture est, comme nous pouvons le lire, à l’image de cette violence
pressentie. La syntaxe absente, le « tu » invoqué, à la fois
comme un pronom personnel et comme le participe passé du verbe
« taire », l’usage des crochets ouverts, comme s’il
s’agissait d’un aparté qui peine à se formuler et qui, aussi, n’arrive
pas à se refermer, nous signifient, du moins tâchent de nous exprimer
le vœu de parole d’Ettore Labbate autant l’impuissance du poète devant
la mort, devant la parole pourtant nécessaire pour dire la mort, faute
de pouvoir la congédier. Aussi le texte contient-il plusieurs langues,
l’italien, le français et le dialecte du Salento. Aussi Mallarmé est-il
forcément présent, à travers « La tombe d’Anatole » et sa
traduction italienne réalisée par Cosimo Ortesta. Mais, que cette œuvre
inachevée de Mallarmé s’intitule ainsi ou « Pour un tombeau
d’Anatole », elle illustre ce que le poète de « La crise de
vers » appelait la « lutte d’un génie et de la mort »,
lutte qui, malgré le deuil ou grâce à lui, met le poète aux prises avec
la langue, comme si la seule mort qui comptait était, avait lieu dans
la langue :
« est étranger qui sait
demeurer loin de sa terre
là où les fils
ne reviennent que pour
ensevelir avec leurs morts » (p. 28)
Serait-ce
Ulysse ne daignant rentrer à Ithaque pour enterrer ou rendre un ultime
hommage aux siens, pour repartir, l’exil étant un royaume, le seul qui
vaille la peine d’être habité ? Ce serait le cas pour Ettore
Labbate qui, dans « Toi vers moi », le troisième chapitre de
Géographie où le vers est la forme d’un journal tenu dans la nuit du 6
au 7 juillet 2009, écrit encore :
« Tu fais un voyage toujours définitif
L’un après l’autre tous mes compagnons sont morts
Il ne faudra plus qu’en arriver seulement » (p. 59)
Ou bien :
« Ton nom flotte sur la mer
la nuit c’est le reflet du ciel
que je peux encore franchir » (p. 63)
Et aussi :
« J’ai franchi la frontière
et mesure en chemin pas à pas
l’absence de tous les mots » (p. 67)
Tous
ces tercets, comme la plupart de cette section, sont pourvus de titres
italiens, respectivement : « Dora Baltea »,
« Sestri Levante », « Lunigiana ? ». Poèmes ou
notes en français pour des lieux italiens ? Qu’est-ce à
dire ? Cela veut-il dire que celui qui visite ou un habite un lieu
étranger peut en mesurer la profondeur, l’esprit, le génie même dans sa
langue ? Sûrement. Ce qui nous retient, qui plus est, dans
Géographie d’Ettore Labbate, c’est qu’il s’agit d’un livre de
dialogue : poèmes et photographies, certes, mais poète-photographe
et langue, lecteurs, exils, royaumes, etc. Ce livre est, à ce titre, un
vrai livre de dialogue, c’est-à-dire un livre ouvert aussi bien vers
l’intérieur que vers l’extérieur.
Aymen Hacen
La
seconde GEOGRAPHIE (2), en italien, vient de paraître aux
Éditions manni ( http://www.mannieditori.it/libro/geografia ) en Italie.



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